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Musée de l'Insurrection de Varsovie

Pavés au sol, intérieur brut parcimonieusement éclairé, mur battant au rythme d'un cœur, ce musée, qui se veut « moderne » et « accessible aux jeunes générations », provoque chez le visiteur un sentiment d'oppression, d'insécurité. Nécessaire ! Retour sur un des épisodes les plus tragiques de l'histoire de Varsovie... ville martyre.

Aucune ville européenne n'a autant souffert de la Seconde Guerre mondiale que la capitale polonaise.. Le musée entend bien nous le rappeler... ou tout simplement l'apprendre à ceux qui l'ignoraient ! Bien que dénommé Musée de l'Insurrection de Varsovie, il ne se contente pas de retracer les 63 jours durant lesquels les Varsoviens se sont héroïquement insurgés face à l'envahisseur nazi. Il couvre également toute la période allant du début de l'occupation allemande à l'installation du régime communiste d'après-guerre.

Le 1er septembre 1939, la Pologne a été envahie par les troupes allemandes, qui ont assommé l'armée polonaises de leur Blitzkrieg (« guerre éclair » en allemand). Hitler était en effet bien décidé à en finir vite avec « ce bâtard de l'Europe », qu'était pour lui la Pologne. Non soutenus par les Soviétiques, qui envahissaient quant à eux la Pologne le 17 septembre, la résistance s'est alors organisée à partir du gouvernement en exil, d'abord à Paris, puis à Angers et enfin à Londres.

L’État secret
Notre guide a bien insisté pour nous faire comprendre que l’État polonais n'a jamais cessé d'exister pendant toute la durée de la guerre. En effet, les trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) existaient tous clandestinement, à l'instar d'une grande armée, l'Armia Krajowa (armée de l'intérieur). Comme l'a raconté méthodiquement l'émissaire Jan Karski dans Mon témoignage devant le monde – Histoire d'un État clandestin, la résistance était divisée en plusieurs branches dont les rôles allaient d'actes de sabotage économique et militaire aux assassinats de gradés nazis, en passant par le soutien moral de la population, via la presse clandestine. Le musée offre d'ailleurs l'occasion de voir plusieurs presses d'imprimerie manuelles, qui étaient souvent installées dans les caves ou les forêts.

L'Armia Krajowa était le plus important mouvement de résistance en action durant la guerre, formant l'aile armée de l’État secret polonais. Son commandant le plus célèbre est Taduesz Bor-Komorowski (juillet 1943 jusqu'à sa capture en septembre 1944), dont le brassard se trouve au musée. Lors du soulèvement en août 1944, les estimations des effectifs de l'AK vont de 250.000 à 350.000 combattants.

En tant qu'armée clandestine opérant dans un pays occupé et séparé des territoires alliés, l'AK a eu d'énormes difficultés à acquérir des armes et des équipements. Principalement, armes et munitions provenaient des stocks nazis (achetées ou volées) ou bien étaient fabriquées dans des ateliers secrets par l'AK elle-même (ci-contre, un Blyskawica). Toutefois, les Polonais ne disposaient pas de l'artillerie lourde allemande (chars, aviation...).

La dernière source d'approvisionnement était les parachutages que faisaient les Alliés pendant l'Insurrection, faute de pouvoir atterrir sur le sol varsovien, par interdiction de Staline. Nombre de pilotes, alliés (britanniques, canadiens, américains) mais aussi polonais, ayant rejoint le gouvernement polonais en exil après la défaite, ont trouvé la mort lors de ces opérations. Un avion Libérator de la Royal Air Force dans la plus grande salle du musée leur rend hommage.

La Kotwica, qui mêle un P avec un W, signait tous les actes de sabotage. Véritable arme psychologique, cette ancre a eu plusieurs sens : « Polska Walczaca » (« Pologne combattante »), « Wojsko Polskie » (« Armée polonaise) ou encore « Powstanie Warszawskie (« Insurrection de Varsovie »). Elle a été interdite par les autorités communistes après la guerre, puis est devenue le symbole d'un mouvement de défense des droits de l'homme en Pologne, avant d'être récupérée par des organisation anti-communistes.

Varsovie pendant la guerre

Un des nombreux objectifs du musée est de nous montrer à quel point les nazis s'employaient à mettre en place un régime de terreur, dans lequel l'arbitraire était roi. Des affiches portant le nom de centaines de Polonais étaient très courantes dans les rues de Varsovie. Elles expliquaient calmement mais sûrement à la résistance que si un soldat allemand était tué, tous les individus présents sur l'affiche seraient liquidés. La résistance a toujours été tiraillée entre ce qu'elle considérait être son devoir et le fait de protéger la vie de ces innocents. Portés par un profond espoir imprégné de romantisme, les résistants donnaient leur vie pour que la Pologne soit libre et souveraine. En effet, ils s'opposaient au positivisme, dans lequel la vie a une valeur suprême, « mieux vaut vivre libres que de vivre à genoux ».

Il y avait 1,3 million d'habitants à Varsovie avant la guerre et déjà plus que 900.000 à l'été 1944, le Ghetto ayant déjà été rayé de la carte depuis plusieurs mois. C'est le 1er août 1944 à 17 heures que l'Insurrection éclata ! Quelques dizaines de milliers d'insurgés, soutenus massivement par la population, face à des soldats allemands suréquipés, le soulèvement aurait pu tenir deux semaines, il durera 63 jours. Nombreux sont les visiteurs qui restent dubitatifs quant à cette offensive sachant à quel point les forces étaient asymétriques. Mais les récentes défaites du IIIè Reich, provoquées par le débarquement en Normandie et l'arrivée des Soviétiques à l'Est, nourrissaient les espoirs des Polonais. Ils ne pouvaient pas imaginer que Staline ordonnerait à son Armée rouge de stopper son avancée dans le quartier de Praga, juste de l'autre côté de la Vistule... pendant cinq mois. Ils ont laissé la Wehrmacht massacrer entre 150 et 200.000 Varsoviens avant d'entrer dans une ville fantôme le 17 janvier 1945.

Ceux qui avaient survécus à toutes ces années de guerre ont été déplacés dans les campagnes, Hitler voulant faire de Varsovie une forteresse militaire pour stopper l'avancée soviétique. Seuls un petit millier d'habitants, les Robinson varsoviens, ont vécu dans les ruines et les égouts pendant plusieurs mois. Les Allemands ont en effet systématiquement pilonné la ville après l'insurrection, ne laissant qu'un champ de ruines de ce qu'avait été Varsovie. La vidéo en 3D proposée lors de votre visite du musée est une reconstitution à partir de photographies prises par des avions en 1945.

L'après-guerre

Des habitants sont progressivement revenus à Varsovie qu'il fallait reconstruire. Pendant plusieurs années, les sœurs de la Croix Rouge polonaise ont exhumé des corps afin d'essayer de les identifier et de leur offrir une sépulture digne. Placés sous la houlette communiste, les Polonais disent finalement « avoir gagné la guerre, mais perdu la paix ». A travers ce musée, ils ne se privent d'ailleurs pas de régler leurs comptes aussi bien avec l'envahisseur allemand que l'occupant russe après 1945.

Pour finir, si « comprendre l'Insurrection c'est comprendre l’incompréhensible », notre guide nous a rappelé que la Pologne existe depuis dix siècles au sein de l'Europe et c'est une des raisons pour laquelle elle s'est toujours battue pour son indépendance.

A visiter absolument : www.1944.pl

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